Tournés vers l’avenir : Prevost et l’historien du domaine Bill Luke partagent un 95e anniversaire

La célébration des 95 ans de Prevost se poursuit toute l’année alors que nous soulignons des clients et des amis de longue date. Par coïncidence, l’auteur et l’historien du domaine de l’autobus, William « Bill » A. Luke, a également soufflé 95 bougies en février dernier. Sa passion pour les autobus et son dévouement au domaine ont souvent reflété et rejoint les valeurs et l’esprit qui sous-tendent et guident l’organisation Prevost. Le fait qu’ils partagent un anniversaire les rapproche encore plus.
À l’hiver 1924, Eugène Prévost marque neuf ans de carrière comme ébéniste, spécialisé dans la production de bancs d’église et de mobilier scolaire dans son atelier de Sainte-Claire, au Québec. Sa carrière prend un tournant le jour où son bon ami, George Roy, lui partage son idée unique de transport de passagers et encourage Eugène à fabriquer une carrosserie d’autocar en bois pour la monter sur un châssis de camion REO dont il vient de faire l’acquisition.
Jeune, Eugène Prévost est initié à l’ébénisterie en aidant son père, Joseph, à bâtir la maison familiale. Ses aptitudes mécaniques remontent au side-car de moto qu’il a construit afin de permettre à son père vieillissant de visiter ses fils aînés qui se sont établis au Vermont.
M. Prévost saisit rapidement le concept de M. Roy et accepte avec enthousiasme le mandat de fabriquer sa première carrosserie d’autocar, sans se douter de la vaste gamme d’autobus et d’autocars qui s’ensuivrait, ni de l’entreprise d’autocars nord-américaine qui porterait son nom.
Au cours des années 1930, Eugène Prévost continue de fabriquer des carrosseries d’autocar en bois en parallèle de ses activités d’ébénisterie, à une cadence d’une carrosserie par hiver, destinée à différents fabricants de camions. Il finit par s’y consacrer entièrement en 1937 avec la construction de sa première usine de fabrication d’autobus. Plus tard, M. Roy dirait qu’il avait le pressentiment que son ami réorienterait ses talents vers ce nouveau domaine de transport automobile.
Pendant qu’Eugène Prévost fabrique sa première carrosserie d’autocar en 1924, William Luke, qui deviendrait un jour l’éditeur, l’auteur et l’historien le plus connu du domaine de l’autobus, voit le jour à Virginia, au Minnesota.
Tandis que l’entreprise d’autocars d’Eugène évolue, le jeune Bill s’intéresse aussi aux autobus. La plupart des garçons de son âge aiment les voitures, mais Bill admire plutôt les majestueux autocars Greyhound qui entrent et sortent du terminus près du siège social de l’entreprise à Hibbard, au Minnesota.
Plus tôt cette année, du confort de son complexe de retraite à Spokane, dans l’état de Washington, Bill Luke s’est rappelé des souvenirs à l’approche de son 95e anniversaire de naissance et a partagé quelques extraits de l’autobiographie qu’il se prépare à publier. Bien des éléments de la vie de Bill ont évolué de façon parallèle et le relient à l’organisation Prevost ; les deux partagent presque un siècle dans le domaine de l’autobus et de l’autocar.
« Plus jeune, j’adorais flâner au terminus et parler avec les chauffeurs et les préposés à la billetterie », affirme-t-il. « J’ai eu quelques petits emplois, mais le domaine de l’autobus et les complexités des horaires, en particulier, me fascinaient. Je savais que c’était là mon avenir. »
Un voyage en autocar « captivant » à l’âge de 11 ans avec son père à bord d’un des premiers autocars Yellow Coach 719 à destination de la fête foraine du Minnesota confirme son choix.
La croissance et l’évolution de l’industrie de l’autocar dans les années 1930 trouvent écho dans la créativité d’Eugène, qui passe de structures tout en bois à la fabrication d’autobus dotés de carrosseries en bois avec des panneaux latéraux métalliques.
Pendant ce temps, Bill Luke s’intéresse à la menuiserie, sculptant des modèles réduits de ses autocars préférés à partir de blocs de bois et en y peignant les graphiques et le lettrage de l’entreprise dans les moindres détails. Il a ainsi sculpté et peint plus de cent modèles réduits, dont plusieurs sont encore en sa possession.
La carrière de Bill dans le domaine de l’autocar prend officiellement son envol à la fin de son service militaire après la Seconde Guerre mondiale ; c’est également à cette époque qu’il épouse sa chère Adelene, avec qui il partagera sa vie pendant 62 ans de mariage.
M. Luke sert dans le corps des ingénieurs de l’armée américaine et participe au débarquement en Normandie le 6 juin 1944, où son unité tranche les routes au sommet de la crête qui descend vers l’intérieur de la France. Après son retour sain et sauf, il raconte que son premier objectif professionnel est d’avoir sa propre entreprise de transport par autocar, mais il admet que ce but s’est graduellement estompé par manque d’opportunité.
« Avec le recul, j’étais probablement trop ambitieux », dit-il. « Malgré tout, les amitiés que j’ai forgées pendant ces tentatives ont été très précieuses pour moi. »
En 1948, fort de sa grande minutie, Bill se joint à Jefferson Lines à Minneapolis, au Minnesota. Pendant 21 ans, il y perfectionne ses aptitudes de planification d’horaires. Il œuvre ensuite pendant huit ans chez Empire Lines à Spokane, dans l’état de Washington, après que la lune de miel de Bill et d’Adelene dans les Rocheuses canadiennes les ait inspirés à déménager dans le nord-ouest du pays. Bill devient par la suite commissaire du transport collectif à Spokane.
Bill se souvient bien de la première fois qu’il a vu un autocar Prevost, en 1950, lors d’un voyage par autocar au Québec. Sa première visite de l’usine aurait lieu 17 ans plus tard ; à titre d’auteur et d’éditeur, il y verrait la fabrication du nouveau Prevost Champion, le premier modèle de l’entreprise à cibler les exploitants américains.
Pendant ce temps, M. Prevost profite du succès de sa première carrosserie de bois et d’aluminium, fabriquée avec si grand soin que son premier client lui en commande rapidement une deuxième. Il commence à comprendre que son avenir passe inévitablement par l’autocar. Il construit donc sa première usine dédiée à la fabrication d’autocars en 1937, en parallèle de son entreprise d’ébénisterie et d’ameublement.
Après la Seconde Guerre mondiale, Eugène délaisse l’ébénisterie pour se consacrer entièrement à la fabrication d’autocars interurbains ; c’est ainsi qu’il bâtit Les Ateliers Prevost. Au cours des 12 années qui suivent, le design des autobus Prevost se transforme graduellement, passant d’une carrosserie et d’un châssis entièrement en bois à une combinaison carrosserie et châssis entièrement en métal.
Les Ateliers Prevost s’agrandissent et atteignent 40 000 pieds carrés, abritant des ateliers pour travailler le bois et le métal et faire la coulée sous pression et le plaquage ; elles comprennent également une fonderie. La liste de clients s’allonge et comprend le Gouvernement canadien et le ministère de la Défense.
En 1957, à l’âge de 59 ans, M. Prevost choisit de vendre son entreprise à l’industriel Paul Normand, qui la renomme Prevost Car Inc. L’autocar Le Normand argenté avec un moteur diesel et une suspension pneumatique est le premier modèle fabriqué sous sa direction.
Thomas B. Harbison et William G. Campbell deviennent partenaires en 1967 avec le président de Prevost Car de l’époque, André Normand. Ils en deviendront les propriétaires uniques presque 30 ans plus tard, en 1996.
Le moment « Euréka » de Bill Luke survient lorsqu’il imagine Bus Ride Magazine, qu’il lance avec son épouse Adelene en 1965 et qui se veut la voix prééminente du domaine de l’autobus et de ses exploitants.
M. Luke participe à titre de président du sous-comité des horaires de la National Association of Motor Bus Owners et contribue à la fondation de la Bus History Association. Les autres membres du comité alimentent son intérêt insatiable pour l’histoire de l’autobus en lui offrant les récits historiques et des photos de leurs entreprises et d’anciens équipements ; le tout attise sa vocation d’auteur, d’éditeur et d’ambassadeur d’office du domaine.
« Nous avons créé Bus Ride sous le nom de notre entreprise, Friendship Publications », affirme Bill. « Nous voulions que notre nouvelle entreprise couvre les activités du domaine de l’autobus et reflète la gentillesse et le respect dont font preuve les gens du domaine. »
De même, en ce qui concerne le lancement de son entreprise, Eugène Prevost remarque qu’au-delà de fabriquer des autocars, la mission se doit d’être d’apporter plus de confort aux gens et d’améliorer leur vie. Malgré tout, certains se moquent des nouveaux modèles d’affaires de ces pionniers.
Selon Bill, « les gens nous disaient : “Eh bien, bonne chance” et nous n’avions qu’une réponse pour eux : “En fait, il n’y a pas plus facile comme façon de faire affaire.” Notre survie et notre croissance passent par nos amitiés. »
Prevost Car Inc. fait ainsi partie des premiers à placer des annonces dans Bus Ride. La relation d’affaires durable qui s’ensuit comprend plusieurs visites à l’usine québécoise pour le lancement de chaque nouveau modèle Prevost. M. Luke écrit régulièrement au sujet de Prevost ; il photographie chaque nouveau modèle et plus tard réunit une archive photographique des anciens produits et des parcs de véhicules des clients de Prevost.
Parallèlement à sa couverture éditoriale dans Bus Ride, Bill et son collègue de Jefferson Lines, Joe Foty, fondent en 1964 les Bus Maintenance Forums, qui connaissent un vif succès et deviennent un complément de Friendship Publications en 1972.
Comme Prevost a toujours consacré d’importantes ressources pour assurer la satisfaction client après-vente, l’entreprise participe activement avec Bill et Joe et anime une série d’ateliers instructifs partout au pays.
Eugène Prévost s’éteint à 66 ans, à la même période que la fondation de Bus Ride.
« Le lien privilégié que j’entretiens avec l’organisation Prevost a toujours été très spécial pour moi », se souvient Bill. « J’ai eu la chance de rencontrer et de visiter bien des gens de chez Prevost qui sont devenus des amis de longue date. »
Depuis, M. Luke a publié 16 livres sur l’histoire des autobus et des exploitants qui illustrent l’évolution du domaine de l’autobus et de l’autocar en Amérique du Nord. Ses documents d’archives et ses anciennes photos ont été confiés au Northwestern University Transportation Center à Evanston, en Illinois, et au Henry Ford Museum à Dearborn, au Michigan.
Depuis, M. Luke a publié 16 livres sur l’histoire des autobus et des exploitants qui illustrent l’évolution du domaine de l’autobus et de l’autocar en Amérique du Nord. Ses documents d’archives et ses anciennes photos ont été confiés au Northwestern University Transportation Center à Evanston, en Illinois, et au Henry Ford Museum à Dearborn, au Michigan.
Depuis 1924, Prevost a conçu et mis en marché presque 30 modèles d’autocars, de maisons motorisées et de carrosseries pour la conversion repensés de façon impressionnante et dotés de nouvelles technologies.
Au cours de ses 95 années, l’organisation Prevost connaît cinq agrandissements de son usine et cinq propriétaires, culminant avec l’acquisition à part entière de l’entreprise en 2005 par la suédoise Volvo. L’adoption du Volvo 9700 par Prevost s’en retrouve ainsi facilitée.
En 1999, George Bourelle (président et chef de la direction de Prevost Car à l’époque) s’affaire à élaborer un hommage aux pionniers de l’entreprise pour souligner son 75e anniversaire lorsqu’il a l’occasion de rencontrer William « Bill » Luke pour la première fois.
Dans l’avant-propos du livre de M. Luke consacré à Prevost, Prevost Buses: 1924-2002 Photo Archive, M. Bourelle souligne la volonté et l’enthousiasme de Bill à l’aider à préserver les souvenirs de l’entreprise et à « montrer aux plus jeunes dans l’entreprise comment c’était à l’époque. »
M. Bourelle écrit entre autres : « Le niveau de connaissance de notre entreprise dont Bill fait preuve est époustouflant et je souhaite le remercier de son initiative et de son dévouement à la création de cette magnifique archive. »
Pleins feux sur l’avenir
En janvier 2019, à la veille de la 95e année de Prevost, son vice-président et directeur général, François Tremblay, prend la parole à la UMA EXPO à Fort Lauderdale, en Floride, pour vanter les mérites de l’autocar X3-45 2020 redessiné de Prevost, ainsi que les innovations élégantes qui vont propulser le H3-45 vers les 95 prochaines années.
Au même moment, à un mois de son 95e anniversaire de naissance, Bill Luke se penche sur son ordinateur et son portable, téléphone cellulaire à la main, confirmant qu’il est encore bien de son temps. Il peaufine actuellement son autobiographie, qui souligne ses contributions ainsi que celles de sa défunte épouse, Adelene, au domaine de l’autobus en Amérique du Nord. Surtout, il continue à partager son histoire et à entretenir des amitiés qui l’ont comblé personnellement et professionnellement.
À 95 ans, Prevost et Bill Luke sont tous deux tournés vers l’avenir.